Charlotte Gainsbourg : «J’ai besoin d’être désirée» (Le Matin)

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Par Laurent Flückiger, Le Matin, publié le 13.05.2012 

CONCERT — Entre la musique et le cinéma, Charlotte Gainsbourg ne choisit pas. Elle sera aux Docks de Lausanne, le 24 mai.

Chanteuse pour la première fois à 13 ans («Lemon Incest» en 1984, avec son père, Serge), Charlotte Gainsbourg a attendu vingt-six ans avant de lancer sa première tournée avec son 3e album, «IRM». C’est qu’entre-temps la «délicieuse enfant» s’est fait un joli nom au cinéma. Le 24 mai, elle retrouvera la scène, celle des Docks, à Lausanne, pour présenter «Stage Whisper» en compagnie du Néo-Zélandais qui monte, Connan Mockasin. Coup de fil.

Vous revenez avec l’album live de votre première tournée. Que découvrirons-nous de neuf sur scène?
Ce ne sont plus les musiciens rock qui ont travaillé avec Beck. En rencontrant Connan Mockasin, j’ai découvert une autre manière d’aborder la scène. Moi, je ne sais pas décrire les styles musicaux. Mais je dirais qu’il a une vraie sensibilité qui pourrait être acoustique, alors que c’est de la musique électrique. (Rires.)

Et le répertoire prévu?
Je fais quelques chansons du premier album que mon père m’avait fait à 16 ans (ndlr: «Charlotte For Ever»). J’ai cru que je ne pourrais jamais les interpréter, car ce sont les mots d’une adolescente. Mais j’y prends beaucoup de plaisir. Il y a des morceaux de «5:55», d’«IRM» et surtout les huit inédits de «Stage Whisper».

Votre voix vous complexait. Vous en êtes enfin satisfaite?
Maintenant oui. Sur «5:55», je m’étais dégonflée, je n’avais pas fait de tournée. Je me suis poussée à le faire avec «IRM». J’en avais envie, mais je ne m’en sentais pas capable. J’y suis allée en étant très complexée par mon manque de voix. Pour ces nouvelles dates, je suis beaucoup plus détendue: je m’en fous d’avoir prouvé quelque chose ou non. Je sais que les gens qui viennent me voir en ont envie. Et je réalise que ce n’est pas si grave de n’être que soi-même.

Vous êtes à l’aise avec votre public?
Non, pas du tout. Je ne me suis pas transformée, j’ai toujours une grande appréhension. J’aurai sans doute autant de mal à m’adresser aux gens, mais je sais que j’ai eu du plaisir à les regarder la dernière fois.

Et dans votre façon d’occuper la scène?
Je suis encore moins à l’aise qu’avant. Au début, je me disais qu’il fallait bouger un peu, et ça me préoccupait beaucoup. C’est encore le cas.

Vous semblez moins préoccupée par votre corps au cinéma. Vous incarnerez d’ailleurs une nymphomane dans le prochain Lars Von Trier.
Je suis plus à l’aise quand je suis dirigée par quelqu’un. Ça ne veut pas dire que c’est facile pour moi d’être nue devant une caméra. Mais c’est vrai, je l’ai déjà fait avec Lars, qui sait me mettre en confiance, même si c’est très cru.

On parle autant de vous en tant qu’actrice que chanteuse. Que vous apporte chacune de vos deux carrières?
Aujourd’hui, je ne pourrais pas me passer de l’une comme de l’autre. Avec la musique, j’agis selon mes envies. Avec le cinéma, il faut attendre qu’un metteur en scène vienne vous chercher. Ou pas. Tout ça joue avec l’estime de soi. Je m’y sens plus vulnérable. Mais les deux carrières sont devenues complémentaires, car j’ai besoin du regard de quelqu’un d’autre, d’être désirée.

 

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