Charlotte Gainsbourg : « Je ne pouvais plus respirer » (Vogue)

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Au fil d’une interview exclusive pour Vogue, Charlotte Gainsbourg livre tout ce qu’il faut savoir sur son nouvel album Rest, qui sortira le 17 novembre, sur New York, sa relation avec la mode et sa collaboration avec la maison Saint Laurent.

Il y a trois ans, tout a changé pour Charlotte Gainsbourg. À la suite du décès de sa demi-sœur Kate, l’actrice et musicienne a quitté Paris pour New York City, accompagnée de son partenaire de toujours Yvan Attal et de leurs trois enfants.

« Je ne pouvais plus respirer », raconte Gainsbourg en évoquant Paris, assise dans une suite du Blakes Hotel à Londres. « Je ne sais pas si je resterai longtemps [à New York] car je sens bien que c’est un entre-deux, mais je ne suis pas encore prête à rentrer à Paris. Et je ne vois pas d’autres alternatives. Quand je suis arrivée ici, j’ai trouvé tout tellement accueillant et rafraîchissant. C’était une véritable découverte. »

C’est à New York que le nouvel album de Charlotte Gainsbourg, Rest, qui sortira le 17 novembre, a vu le jour. Cela faisait plusieurs années qu’elle écrivait des paroles et brassait des idées de chansons. Mais ce n’est qu’en se retrouvant dans un nouveau pays qu’elle s’est sentie prête à rejoindre les studios d’enregistrement avec le producteur SebastiAn. Rest est le cinquième album de la chanteuse (son dernier, Stage Whisper, est sorti en 2011) et le premier pour lequel elle écrit elle-même les paroles. Par le passé, elle avait fait appel à des collaborateurs pour l’aider à choisir ses mots. Mais cette fois-ci, elle s’est sentie prête à sauter le pas et à révéler quelque chose de plus personnel. « C’était une question de courage, explique-t-elle. Tout a pris forme à New York après mon départ de Paris. L’élément central était ma sœur, car je ne pouvais penser à rien d’autre à ce moment-là. Et je me moquais que ce soit bon ou pas. C’est ce que je voulais dire. Et me dire à moi-même. Je ne pensais pas vraiment à ce que les gens allaient entendre. »

En tant qu’artiste musicienne, Charlotte a souvent vécu dans l’ombre du succès de son père Serge Gainsbourg. Aujourd’hui encore, il est considéré comme l’un des musiciens français les plus influents, et c’est lui qui a composé le premier album de sa fille, Charlotte For Ever, sorti en 1986. Sur Rest, elle est enfin prête à couper le cordon et à accepter l’imperfection. « Je n’ai jamais été satisfaite de moi-même en tant qu’actrice, ni en tant que chanteuse, raconte Gainsbourg. Mais j’ai compris dès le début en travaillant avec mon père que quand on n’a pas une voix faite pour le chant, tout l’intérêt est dans les petits accidents. La respiration, le fait de chanter parfois légèrement faux – ce sont ces petites choses qui donne de la vie au son. J’ai mis du temps à le comprendre, mais je préfère les erreurs à une chose jolie et parfaite. »

Pendant l’enregistrement de son album, sur lequel figure une chanson (Songbird In A Cage) écrite pour elle par le grand Paul McCartney, Gainsbourg a continué de tourner dans plusieurs films. On l’a notamment vue dans Independence Day: Resurgence l’année dernière, et dans le thriller Le Bonhomme de neige cet automne aux côtés de Michael Fassbender. Elle est aussi à l’affiche de la nouvelle adaptation du roman de Romain Gary, La Promesse de l’aube, qui fait actuellement le tour des festivals en Europe. Charlotte sélectionne ses films avec soin – et raconte que son arrivée aux Etats-Unis a aussi modifié sa perception d’elle-même en tant qu’actrice. « En France, la notoriété de mes parents et la pression pour être à la hauteur des attentes était un poids écrasant, explique-t-elle. Cela voulait dire que quand j’estimais ne pas avoir le talent de mon père, je n’osais pas essayer. Alors qu’aux Etats-Unis, j’avais le sentiment de pouvoir tout faire. C’était très ouvert. Les gens sont très facilement des artistes ici. C’est quelque chose de beaucoup plus normal. »

Comme sa mère, Jane Birkin, Gainsbourg est une icône internationale du chic à la française. Mais à New York, la pression est retombée. Elle a coupé ses cheveux et les laisse au naturel. Elle a même commencé à porter des leggings en sortant de chez elle, une chose qu’elle n’aurait jamais pu faire à Paris. »En France, j’ai l’impression de devoir faire des efforts, et quand je suis à New York, je n’ai aucune envie d’en faire, raconte-t-elle en riant. Je m’en moque, je prends mon vélo, j’emmène mes enfants à l’école, et je porte des leggings pour aller à mes cours de Pilates, et je sors comme ça avec un gros pull et des baskets. Je ne ferais jamais ça à Paris. Jamais ! On n’est pas censé montrer qu’on fait du sport ou qu’on prend soin de son corps. Mon personnage est complètement différent là-bas ! »

Gainsbourg a tout de même conservé un partenariat avec Saint Laurent et son directeur artistique Anthony Vaccarello, qui est devenu un véritable ami. Vaccarello lui a demandé de faire partie de la marque, et elle a accepté. Sa première campagne, réalisée par Nathalie Canguilhem, est sortie plus tôt cette année. Canguilhem, qui a également co-réalisé tous les visuels pour Rest avec Gainsbourg, est l’une des seules personnes à qui Charlotte demande des conseils en matière de mode. Mais la plupart du temps, elle préfère enfiler son t-shirt blanc Saint Laurent et un jean large (c’est d’ailleurs ce qu’elle porte le jour de cette interview).

« Je ne m’intéresse pas plus que ça à la mode, admet Gainsbourg. J’adore assister à des défilés de qualité, mais je déteste l’idée d’aller à un défilé. L’idée qu’on me prenne en photo à 9 heures du mat’ et d’être simplement assise là pendant 15 minutes. C’est horrible. » En parlant du partenariat avec Saint Laurent, elle ajoute : « Je pense que [ce partenariat] est un véritable cadeau et ils sont très généreux avec les vêtements. C’est ça qui m’intéresse, avoir des vêtements dans mon placard. »

Gainsbourg a beau s’être installée à New York, elle est tout de même rentrée à Paris pour le défilé printemps/été 2018 de Saint Laurent en septembre. « C’était incroyable, se souvient-elle. En y allant, je croisais les doigts pour lui. Je me disais ‘j’espère que c’est réussi’. Quand on organise un défilé devant la Tour Eiffel et qu’on la fait scintiller pour l’occasion, il y a plutôt intérêt à ce que ça soit réussi. Et le résultat était vraiment au rendez-vous. »
Par Emily Zemler, traduit par Lyse Leroy le 07 Novembre 2017

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